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Chapitre 1

Les luttes dans la vie quotidienne​ – Exemple

Mai 1968

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Je voudrais raconter l’histoire du point de vue des personnes qui ont vécu l’histoire de ces luttes dans la vie quotidienne. Je ne fais pas partie des héroines de l’histoire des luttes, je fais partie des gens qui ont vécu ces luttes. On n’était rien, on ne faisait pas partie des leaders, on n’était pas des stars. Je n’ai pas fait partie des stars du féminisme, des stars de la lutte LGBT, des grandes stars de la lutte contre le SIDA ; j’ai fait partie des personnes qui avaient 15 ans en 1968 qui étaient là et qui se sont senties concernées par ce qui se passait. Je fais partie de la génération 1968, j’étais adolescente, je me trouvais au lycée d’Avranches en classe de 3e et ce qui se passait non seulement m’intéressait mais je me suis sentie immédiatement concernée. J’avais une vie difficile et douloureuse dans une famille complètement dysfonctionnelle, j’ai tout de suite vu dans 1968 et dans le terme AG pour assemblée générale qu’une des réponses à mes problèmes résidait dans le collectif et la lutte organisée.

Nous sommes en mai 1968, j’ai 15 ans, je comprends immédiatement que je ferai partie, c’est-à-dire que je participerai aux luttes.

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Mai 68, c’est au moment où tout s’arrête, l’appel à la grève générale s’inscrit dans un mouvement de contestation totale du politique, du social de la culture. Nous sommes jeunes, je ne suis que lycéenne, mais ce sont nous les jeunes, les lycéens et les étudiants qui XXX le mouvement. Il s’agit d’une opposition des jeunes aux partis politiques, aux syndicats, aux représentants des parties, il s’agit d’un non unanime à toute forme de parole ou de collectif qui serait censé nous représenter. Il s’agit de nous réunir nous les jeunes sans adulte, de nous asseoir par terre et de parler ensemble. Parler devient un acte politique, car à l’époque nous sommes gouvernés par le silence. Nous sommes une génération, la dernière génération élevée dans le silence. Nous sommes victimes et agressés par le silence. Concrètement dans nos vies quotidiennes, si par exemple je prends l’exemple de ma vie, c’est le silence et l’interdiction de parler à table, c’est le silence sur la Seconde Guerre mondiale, les trahisons et les collaborations, c’est le silence sur les viols et les incestes dans le village, c’est le silence sur les règles, le silence sur la sexualité, le silence autour de ma mère femme battue, c’est le silence en classe.


On n’a pas le droit de parler, on n’a pas le droit de répondre à nos parents même si on n’est pas d’accord, on n’a pas le droit de parler en classe, sauf si on a levé la main, on n’a pas le droit de courir en jupes, on n’a pas le droit de dire que l’on a nos règles, on n’a pas le droit de jouer avec les garçons, on n’a pas le droit de choisir nos vêtements, nos coiffures.
J’ai 15 ans en 1968, nous avons 15 ans en 68 et nous en avons marre !

Rajouter une legende pour la photo ? Ou simplement mettre la photo en pleine largeur ?

Faire des barricades c’est montrer que l’on sait se défendre face aux attaques policières et c’est aussi rêver de monter sur les barricades. On entend à la radio ce qui se passe à Paris, je suis en Normandie au lycée d’Avranches, l’atmosphère est différente, la réalité de Paris devient notre rêve. Les élèves de seconde organisent une assemblée générale, je veux y aller, le principal du lycée me dit « Vous ne pouvez pas, vous êtes en troisième, c’est réservé aux élèves de seconde » J’enrage ! Dans la région les gens avaient peur de la guerre civile, les gens se mettaient à parler, les ouvriers des petites usines aux alentours manifestaient dans les rues de Granville, les ouvriers des laiteries dans la Manche se révoltaient contre leurs conditions de travail, les cheminots, les ouvriers de l’arsenal à Cherbourg. Au lycée on exige de participer à la vie de l’établissement, on demande une salle- foyer pour les élèves,  c’est-à-dire une salle dans laquelle les élèves puissent se rencontrer, parler et se détendre.

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